En quoi l’initiative proposée par l’Ugtt, l’ordre des avocats et la Ltdh va-t-elle changer la morosité du quotidien sociopolitique que l’on vit ? C’est que contrairement à 2013 où la tension politique, les divergences inter-partis et les tendances politiques étaient la raison de la crise, cette fois, nous avons une réalité politique hypertendue avec des partis exclus et un piétinant processus du 25 Juillet qui ne fait que flâner au gré des échecs. Mais nous avons surtout des indicateurs macroéconomiques très alarmants et une détérioration du pouvoir d’achat. Tout cela s’accompagne d’une attente frileuse de la signature de l’accord avec le FMI. Un accord qui ne vient pas encore et le scénario d’un effondrement économique qui pèse sur les épaules de tous. Le contexte actuel est si contraignant pour qu’une initiative puisse résoudre le problème. Cette initiative émanant d’instances lourdes et prestigieuses ne devrait pas peser aussi lourd qu’en 2013 pour diverses raisons. D’abord, ces trois instances ne sont pas impartiales, elles sont rentrées depuis longtemps dans le jeu et les clivages politiques et ne peuvent prendre la distance nécessaire. Ce sont aussi des structures qui, en partie, s’opposent au régime politique actuel et en contestent les procédés. Plus, ils ont fait partie d’une manière ou d’une autre du paysage politique d’avant-25 Juillet et ne peuvent en quelques mois dénier leurs interférences politiques.
Et on remarque que du côté du Président Saïed, il n’y a pas encore un répondant ou un accueil chaleureux. Même du côté des opposants de Saïed, ils dénoncent, qu’ils soient des instances ou des figures politiques, leur exclusion. Plutôt que des propositions qui se veulent salvatrices, on a besoin d’un dialogue sérieux qui aboutisse vite à des actions urgentes et une mobilisation générale pour atténuer les effets de la crise économique et politique. On perd trop de temps à rappeler un passé proche qui diffère tant du présent, et à vouloir jouer le rôle de sauveur alors qu’on est une partie du problème. Cette fois, il semble que l’Ugtt, la Ltdh et l’ordre des avocats se trompent de rôle et de timing. La question est beaucoup plus complexe qu’un plan de sauvetage qui exclut les autres et qui ne réussit pas à pousser le Président Saïed et son gouvernement, qui ont le pouvoir absolu en main, à venir dialoguer et surtout à adopter et appliquer des mesures urgentes. Et bien sur, tout ce retard pris ne fait qu’aggraver la crise déjà complexe. Elle est économique oui, mais certainement politique en premier lieu, et là les acteurs politiques, en premier lieu les partis et les personnages, sont les plus habilités à s’imposer.